La France Libre et l’Empire: le ralliement de l’Afrique

La France Libre et l’Empire: le ralliement de l’Afrique

La France Libre et l’Empire: le ralliement de l’Afrique

L’idée que, la métropole occupée, il restait l’Empire et ses ressources humaines et matérielles pour continuer le combat, est à l’origine même de l’épopée gaullienne. Le général de Gaulle ne lançait-il pas le 18 juin 1940 : “La France n’est pas seule… Elle a un vaste Empire derrière elle !” ?

Sitôt reconnu chef des Français libres par le gouvernement britannique le 28 juin 1940, le général de Gaulle, après avoir constitué une première force militaire, s’attache à rallier à sa cause des territoires français d’outre-mer. Il y parvient d’abord en Afrique, où la France exerce alors sa souveraineté sur un vaste Empire. Mais ce ne sont pas uniquement des considérations militaires qui animent un de Gaulle soucieux d’installer le siège du “gouvernement français qui continue la lutte” en “terre française”.

De Gaulle et Eboué à Brazzaville.

“Participer avec des forces et des terres françaises à la bataille d’Afrique”, écrira le général de Gaulle, “c’était arracher la France libre à l’exil et l’installer en France. (…) C’était arracher à la France libre à l’exil et l’installer en toute souveraineté en territoire national”.

Le 27 août, le gouverneur du Tchad, Félix Éboué, premier gouverneur noir d’une colonie française, proclame le ralliement du Tchad. L’Oubangui-Chari (aujourd’hui République centrafricaine) le suit. Les 28 et 29 août, un coup de main hardi du colonel Leclerc sur Douala et Yaoundé lui assure le Cameroun, tandis que le colonel de Larminat prend le pouvoir à Brazzaville, capitale du Congo français.

Succès limité, car de Gaulle a échoué devant Dakar malgré le soutien d’une flotte anglaise et n’aura qu’en octobre la maîtrise du Gabon. Le gouvernement du maréchal Pétain conservait ainsi sous l’obédience de Vichy, et ce jusqu’au débarquement allié de novembre 1942, les territoires les plus riches et stratégiquement les plus importants de l’Empire français, Afrique occidentale et Maghreb.

Succès d’une portée militaire et politique néanmoins considérable. Militairement, l’Afrique équatoriale française – 3 millions de km², 6 millions d’habitants – relie d’un seul tenant l’Atlantique aux territoires britanniques de l’Est africain et l’Égypte : 2 200 avions alliés y transiteront entre 1940 et 1942. L’AEF et le Cameroun apportent à la France libre, outre 16 500 hommes déjà sous les drapeaux, le renfort de 5 bataillons autochtones levés sur place qui s’illustreront à Bir Hakeim, en Italie et jusqu’en Alsace. Sur instruction du général de Gaulle, le Tchad devient une base d’opérations contre le Sahara italien. Après des raids victorieux sur Koufra (1941) et le Fezzan (1942), la colonne Leclerc réalise l’exploit de traverser le Sahara du Tchad à la Méditerranée s’emparant de toutes les positions de défense et oasis italiennes et vient faire en février 1943 sa jonction à Tripoli avec la VIIIe armée britannique.

Sur le plan politique, il y a désormais un “Empire français libre” auquel s’adjoindront, fin 1942, les îles de Madagascar et de La Réunion et Djibouti, avant qu’en juin 1943 le Comité français de la Libération nationale, créé à Alger, unisse dans la guerre toutes les forces et terres françaises d’outre-mer, hormis l’Indochine.

Le général de Gaulle à la conférence de Brazzaville.

De Brazzaville, capitale jusqu’à 1943 de cet Empire français libre, de Gaulle crée en octobre 1940 un « Conseil de Défense de l’Empire », organe consultatif, embryon d’un futur gouvernement français libre. Radio-Brazzaville, devenue en juin 1943 une des stations à ondes courtes les plus puissantes du monde, sera une des voix de la France libre. Et malgré les dures contraintes que leur impose la guerre, l’AEF et le Cameroun sont le banc d’essai d’une politique de “promotion indigène”.

Aussi est-ce à Brazzaville que de Gaulle convoque le 30 janvier 1944 une “conférence africaine française” pour discuter de l’avenir colonial. Dans son discours d’ouverture, il donne pour mission à la France de conduire “les hommes qui vivent dans leur terre natale à l’ombre de notre drapeau (…) à un niveau tel qu’ils puissent un jour être associés chez eux à la gestion de leurs propres affaires”. Malgré le flou des propositions adoptées et la difficulté pour les réformateurs de concilier la promotion des Africains et la consolidation d’un Empire colonial assoupli, le discours de De Gaulle à Brazzaville eut un grand retentissement et reste un symbole.

> Suite: Le ralliement des autres territoires

Manifeste aux Français de l’Afrique équatoriale française, par le colonel de Larminat, 20 août 1940

L’esprit du mouvement de la France libre, par le colonel de Larminat, 23 août 1940

Le Manifeste de Brazzaville, 27 octobre 1940