Hommage de la Nation au général Delestraint

Hommage de la Nation au général Delestraint

Hommage de la Nation au général Delestraint

M. François Mitterrand, président de la République, a rendu un hommage solennel au général Delestraint le vendredi 10 novembre 1989, dans le cadre de l’Hôtel national des Invalides où fut célébré une messe suivie d’une prise d’armes.
En fin d’après-midi, M. André Méric, secrétaire d’État chargé des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre, représentant M. le président de la République a inauguré une plaque en hommage au général Delestraint au Panthéon.
Commandant des chars de combat de la VIIe armée en septembre 1939, puis inspecteur général des chars, le général Delestraint s’engage dès la défaite dans la Résistance.
Sur la proposition de Jean Moulin et après accord du général de Gaulle, il prend le commandement de l’Armée secrète le 11 novembre 1942.
Arrêté à Paris le 9 juin 1943, il est déporté successivement au camp de Natzweiller puis à celui de Dachau.
Il est assassiné le 19 avril 1945, dix jours avant la libération de ce camp.
(D’après SIRPA ACTUALITÉ n° 36)

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Au cours de son allocution le général de Witasse a évoqué la personnalité du général Delestraint, et constaté que, « désormais, la date du 10 novembre devient mémorable puisqu’elle consacre officiellement la mise à la place qu’il mérite, c’est-à-dire la plus élevée, d’un homme, qui, à nos yeux, fut et demeure le symbole du patriotisme, du courage et de la lucidité ».
Le général a ensuite remercié tous ceux qui ont contribué aux efforts de préparation de cette journée d’hommage national, puis il a adressé ses remerciements profondément sincères aux membres de l’association « à la mémoire du général Delestraint », le général de Witasse s’exprime alors ainsi.

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Cette journée marque donc la reconnaissance de la nation envers un homme resté jusqu’à présent méconnu, presque ignoré. PIRE, parfois décrié.
Pourtant, tous ceux qui l’approchèrent à différentes périodes de son existence, admirèrent autant ses qualités de caractère et de cœur, que ses qualités morales et de discernement, et portées à un degré si rare qu’il nous paraissait nécessaire de le citer en exemple à la postérité.
Bien plus que la simple réparation d’une injustice, notre action visait à remplir un devoir vis-à-vis de l’histoire de notre pays dont il symbolisait les plus éminentes vertus.
Ce soir, au Panthéon, deux hommes seront réunis dans notre souvenir.
Disparus tous deux au combat, ils possèdent la douloureuse caractéristique d’être demeurés sans sépulture.
L’un « héros légendaire tombé en plein ciel de gloire ». L’autre, héros jusqu’ici méconnu, assassiné dans la « Nuit et le Brouillard. »
L’un, guerrier fulgurant, Siegfried des temps modernes, étincelait de rayonnante jeunesse. L’autre, oublié de l’histoire, surgit des ténèbres après un demi-siècle de silence et d’indifférence.
Apparemment tout sépare ces deux hommes, qui, cependant, possèdent cette prestigieuse ressemblance de pouvoir, à des titres différents, être proposés comme modèles à notre jeunesse militaire.
Notre École de l’air a adopté la fière devise de Guynemer : « Faire face ».
Mais la devise du général Delestraint : « Être exact » pourrait, elle aussi, être proposée à une promotion d’élèves officiers.
Durant toute votre vie, Mon Général, vous avez été exact aux yeux de ceux qui vous ont approché, connu, admiré.
EXACT, vous l’avez été dans votre jugement, en adoptant les conceptions stratégiques alors révolutionnaires, de votre subordonné : le colonel de Gaulle, et concernant l’emploi des blindés.
EXACT, vous l’avez été, ensuite, dans la rigueur de votre courage, en bravant les interdit, du chef de l’État français, puis les terribles menaces de l’occupant, et en acceptant la périlleuse mission de créer l’ARMÉE SECRÈTE : l’« A.S. »
Mais, EXACT, vous l’avez été bien davantage encore par la noblesse de votre comportement, intensément chrétien, dans l’effroyable détresse des camps de déportation.
Dans son entourage immédiat, le général de Gaulle ne cachait pas la véritable vénération qu’il éprouvait à l’égard de son ancien chef devenu volontairement son subordonné.
Après un demi-siècle, ou presque, de purgatoire, 1989 voit donc la consécration nationale du général Delestraint.
L’année prochaine sera, pour les Français, particulièrement riche en commémorations : centenaire de la naissance du général de Gaulle, elle sera aussi celle du cinquantenaire de cet Appel du 18 Juin 1940 qui modifia totalement le cours de notre histoire. Il serait infiniment souhaitable que, pendant cette année d’évocations d’un passé glorieux, la consécration nationale du général Delestraint, puisse se poursuivre par une journée d’information historique, et par l’attribution de son nom à une promotion de futurs officiers.
« ÊTRE EXACT» est une bien noble devise, et Charles Delestraint, un bien beau nom de baptême, à proposer à des Saint-Cyriens.

Extrait de la Revue de la France Libre, n° 269, 1er trimestre 1990.