La Maison de France est… votre maison (7 novembre 1941)

La Maison de France est… votre maison (7 novembre 1941)

La Maison de France est… votre maison (7 novembre 1941)

Elle reçoit et distribue à votre intention des journaux comme France, France d’Abord, et des périodiques tels que La France Libre, destinés à vous mieux instruire sur l’idéal de la grande cause commune.

Elle a jusqu’ici distribué plus de 2 000 séries hebdomadaires du journal France, plusieurs centaines d’illustrés de guerre et diverses brochures, et environ 300 exemplaires de la revue mensuelle La France Libre.
Cette revue, l’une des plus intéressantes publications de ce genre, vous a déjà été présentée ici dans son ensemble par une voix autorisée, mais beaucoup d’entre vous ne la connaissent pas encore. Nous avons pensé vous intéresser en vous lisant ce soir la présentation faite par l’éditeur lui-même, André Labarthe, dont le talent incontestable vous fera comprendre, mieux que nous ne saurions le faire, l’idée poursuivie.
Cette présentation figure au début du premier numéro publié en date du 15 novembre dernier.
La voici :
« Cette revue s’adresse à tous les Français. Elle s’adresse aussi à tous ceux qui aiment la France.
« Au début de l’été de 1940, dans tous les pays où règne encore la liberté, l’homme le plus humble revenant du travail et apprenant « la nouvelle » a senti que quelque chose de grand allait disparaître. La France venait d’être frappée.
« Ceux qui ont eu le bonheur de naître dans ces petits villages de France, où chaque pierre est lourde de souvenirs, où chaque sentier raconte une histoire, ont tout perdu de ce qui faisait un peu leur grandeur. Le devoir de tous les Français Libres n’en est que plus impérieux au lendemain du désastre, ils proclament leur foi clans le destin de leur patrie.
« Notre pays a trop donné au monde pour que son sort laisse indifférent ceux qui respectent les valeurs de l’esprit. La France a un trop grand passé pour qu’une défaite militaire mette un terme à sa mission humaine.
« La voix de la France s’est tue. Quand on écoute des paroles, quand on lit des journaux qui viennent de chez nous, on ne reconnaît plus celui qui parle. Prise à la gorge, la France est contrainte de se taire ou de se renier.
« Sur notre sol profané, les Allemands commettent déjà le sacrilège. On change les manuels d’histoire, on vole les tableaux des musées, on brûle les livres, on persécute… Ô Voltaire!
« À la croisade de la force, aux peuples qui pour faire des conquêtes arrivent trop tard clans l’histoire de l’humanité, nous voulons opposer la croisade des idées. C’est par le courage et la force que l’on gagne les batailles, c’est aussi par la force des idées. Cette guerre qui, derrière les canons, oppose les doctrines, doit se terminer par la victoire de ceux qui voient dans la liberté et dans le respect nuancé de toutes les croyances le climat nécessaire à la culture. La victoire allemande entraîne l’asservissement du vaincu: elle lui impose toutes les abdications, même celles de l’esprit.
« Les armées que Hitler a lancées sur le monde sont soutenues par une technique que l’Allemagne a détournée de sa véritable fonction. L’Allemagne a élevé la conception de la guerre à la hauteur d’un principe qui domine la vie de la nation tout entière. Ses savants, ses ingénieurs, on peut même dire certains de ses penseurs les plus éminents, ont donné le meilleur d’eux-mêmes à l’élaboration d’une technique supérieure de la guerre. La science est orientée par l’Allemagne vers l’art des batailles. Pendant la paix, qui ne fut pour elle, que le temps du repli, le laboratoire est demeuré le serviteur fidèle de l’État-major.
« Le drame qui se déroule à notre époque met en cause toute une civilisation. Rien n’est encore décidé. La lutte gigantesque que l’Empire Britannique mène devant le monde fixe un des tournants de l’histoire. La cause de la Grande-Bretagne est celle de la France, elle est aussi celle de tous les hommes qui veulent continuer à penser et à travailler dans la paix et la liberté. C’est une souffrance pour chaque Français de ne pas donner davantage à ceux qui ne refusent aucun sacrifice pour épargner à l’humanité peut-être le plus tragique des reculs.
« C’est parce .que nous gardons conscience et espoir, face aux événements actuels, que nous voulons opposer à l’envahisseur l’esprit de résistance jusqu’à la libération de notre patrie. Ce n’est pas la défaite mais l’acceptation morale de la défaite qui fait du vaincu un esclave. C’est parce qu’elle n’a jamais abdiqué dans le passé que notre patrie a été grande. La France n’abdiquera pas.
« Nous faisons appel à tous les Français à travers le monde. Nous leur demandons de s’unir à nous pour proclamer leur fidélité à l’âme nationale, c’est-à-dire aux valeurs qui furent l’honneur et restent l’auréole de notre pays.
« Le Français depuis des siècles essaie de maintenir en Europe le drapeau d’une liberté humaine. Il l’a porté comme une croix et son calvaire n’est pas fini. C’est pour que la France retrouve sa vocation que nous lutterons pour le rétablissement de toute sa puissance. »
Cette magistrale présentation d’une si belle tenue littéraire vous incitera sans doute à vous procurer cette revue car les écrivains qui y collaborent sont de valeur et vous aideront certainement à mieux comprendre encore l’idée de la France Libre.

Le document

Cette 5e émission radiophonique de la Maison de France est diffusée le 7 novembre 1941 sur les ondes de Radio-Maurice. Voir La Maison de France, Île Maurice, 1941-1946, recueil – souvenir, Port-Louis, 1946.