En souvenir de Bir-Hakeim

En souvenir de Bir-Hakeim

En souvenir de Bir-Hakeim

Il n’est pas vain de rappeler la mémoire de ceux des nôtres qui s’illustrèrent au cours de cette bataille. S’il est impossible de rendre un hommage particulier à tous ceux qui tombèrent alors, il convient de le faire chaque fois que le souvenir de l’un d’entre eux peut être évoqué.
C’est pourquoi nous reproduisons ci-dessous l’allocution de l’élève-aspirant Dargent, tombé à Bir-Hakeim, à l’âge de 20 ans, qui, au nom de ses camarades, salua le général de Larminat venu, le 23 février 1941, inaugurer, à Brazzaville, l’École « Colonna-d’Ornano » dont le capitaine Béguin qui la commandait, lui faisait les honneurs.
« Mon Général,
« Vous avez devant vous des hommes dont l’âme a enduré des épreuves dures et pénibles.
« Pour la plupart, nous avons connu l’immense tristesse de l’étrave d’un navire, jaillissant de l’écume, d’un grand départ, côtes de France s’éloignant à l’horizon.
« Tous, nous avons connu l’au revoir moral à la France.
« Nos âges sont dissemblables. Nos formations intellectuelles visaient à des buts différents. Nos vies furent, dans le passé, infiniment diverses.
« Mais nous n’avons tous qu’un âge : celui dont nous ont marqué les épreuves passées. Nous n’avons plus qu’un but : servir. Nos vies suivront, dans le futur, des voies parallèles.
« Nos corps sont prêts, nos âmes ont été modelées, taillées rudement par les chocs subis. Elles n’en ont acquis que de la fermeté.
« La France peut nous demander beaucoup. Nos âmes, comme nos corps, répondront d’un élan pur, réfléchi, conscient, aux efforts demandés.
« Nous sommes des jeunes qui avons une haute ambition : former une vieille garde.
« Nous n’avons pas peur du danger : nous l’avons prouvé et saurons le prouver encore.
« Nous n’avons pas peur des responsabilités. Cela encore nous voulons le prouver, souvent, Mon Général.
« Car nous savons tous que ceux d’entre nous qui deviendront officiers, s’ils peuvent espérer un peu de respect, auront surtout les sérieux devoirs du travail, de la patience, de l’ardeur, du courage, et la charge importante des lourdes responsabilités.
« Les leçons d’une France blessée, l’exemple de nos alliés nous aident puissamment dans la compréhension de nos devoirs actuels et futurs.
« Nous ne sommes ni des surhommes, ni des saints ; mais nos devoirs envers notre patrie, envers nos chefs, envers nous-mêmes, enfin, nous hausseront au-dessus de ce que nous fûmes.
« Nous ne faillirons pas à nos devoirs.
« Nous verrons un jour la proue de notre navire dirigée vers la France.
« Nous arracherons à nos ennemis, par les armes, et par la force souveraine d’une volonté indestructible, les bonheurs qu’ils nous ont ravis.
« Nous partirons et prendrons chaque joie d’assaut.
« De victoire en victoire, nous parviendrons au bonheur suprême de la Résurrection et de la pureté de la France.
ACTION – SACRIFICE – ESPÉRANCE
« Mon Général, mettez-nous à l’épreuve. »
*
Nous illustrerons ces paroles par les deux citations obtenues lors de ce combat de Bir-Hakeim par le médecin-capitaine Genet de la 13e Demi-Brigade de la Légion Étrangère qui fut grièvement blessé et trouva une mort glorieuse en 1945, au cours du dernier engagement de son bataillon.
Dans notre numéro spécial du 25e anniversaire de Bir-Hakeim nous avons publié, page 31, une photo du colonel Amilakvari et du commandant Puchois, sans nommer le jeune officier, penché derrière eux, qui était le médecin-capitaine Genet. Voici la citation à l’ordre de l’armée du 9 septembre 1942 :
« Médecin de Légion dès le début des F.F.L., a participé à toutes les campagnes. Officier remarquable par son sens du devoir, son courage et son sang-froid.
« Durant les combats de Bir-Hakeim, n’a cessé de se dévouer avec un complet mépris du danger. A été blessé dans l’accomplissement de son devoir au cours de la sortie de vive force le 11 juin 1942. »
Et voici celle lui donnant la croix de la Libération :
« Genet André, médecin-capitaine. Médecin-chef du 3e bataillon de Légion.
« Au cours du siège de Bir-Hakeim, s’est porté aux endroits les plus exposés pour soigner et évacuer les blessés. Le 11 mai 1942, a quitté la position de Bir-Hakeim en emportant tous ses blessés et les a ramenés dans les lignes amies. Pendant la sortie, a encore recueilli, sous le feu, plusieurs hommes touchés, quoique lui-même eut été grièvement blessé au bras par une balle de mitrailleuse. A participé déjà aux campagnes de Norvège, Érythrée et de Syrie. A été deux fois cité pour son courage et son dévouement. »
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 173, avril-mai 1968.