Roger Wybot

Roger Wybot

Roger Wybot

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Roger Wybot (RFL).

Ancien du BCRA et du 1er RA, fondateur de la DST, Roger Wybot, (Warin de son nom d’origine) est mort le 26 septembre dernier. Il allait entrer dans sa 85e année.

Parisien, il était né dans le 18e arrondissement, il avait fait ses études secondaires et préparé les concours des grandes écoles au collège Chaptal. Admissible à l’École polytechnique, il choisit cependant d’effectuer son service militaire et passe par l’École d’artillerie de Poitiers. Sous-lieutenant, il demande à la fin de son service à être mis en situation d’activité et intègre l’École d’application d’artillerie de Fontainebleau. En 1938, il devient sous-lieutenant d’active et rejoint un régiment d’artillerie antiaérienne protégeant Paris. Malgré son aspect juvénile, qu’il conservera longtemps, il sait asseoir son autorité et, sur le plan technique, améliore des méthodes de repérage. En juin 1940, il prend une part importante dans l’opération de repli des 16 batteries de son groupement et réussit à leur faire franchir la Loire sous la menace directe de l’ennemi. Cela lui vaut sa première citation.
Il désapprouve l’armistice et, dès le mois d’août, commence à regrouper des camarades qui, comme lui, ne veulent pas subir. Parmi eux, Stanislas Mangin, Tavian-Collin, Edgard Tupet-Thomé, qui, à la fin de la guerre, seront faits Compagnons de la Libération. Ensemble ils cherchent à gagner l’Angleterre. Mais à Perpignan Roger Wybot rencontre le capitaine Fourcaud, revenu en mission de Londres, qui lui demande de rester en France et de développer son réseau pour faire du renseignement, ce à quoi il va aussitôt s’attacher. Il se fait affecter au bureau « Menées antinationales » de Marseille, excellente position pour sa mission. Un peu plus tard, le capitaine Paillole, qui dirige un service militaire de renseignement, « Travaux ruraux », lui propose de prendre la direction de l’antenne de Paris dont le responsable a été arrêté par l’Abwehr. Mais il ne rejoindra pas ce poste car il est lui-même interpellé, en même temps que Fourcaud, par les services de la Surveillance du territoire de Marseille. Il réussira à se disculper aisément grâce au comportement national de certains fonctionnaires. Ayant étoffé son réseau, il gagne Londres au mois d’octobre 1941 pour y recevoir une orientation et des instructions.
Mais le général de Gaulle ne désire pas qu’il retourne en France et l’affecte au SR de la France Libre, que dirige le commandant Passy. Là il propose un plan d’extension du service et une nouvelle organisation, ainsi que le sigle BCRA, qui sont retenus. Lui-même est chargé de la section de contre-espionnage, qu’il organise et fait fonctionner avec des méthodes rigoureuses et rationnelles. Dans le même temps, il suit les activités de son réseau en France. Il est promu capitaine.
Au début de l’année 1943, à la suite de différends internes au service, il demande sa mutation dans les forces qui combattent au Moyen-Orient. À Gambut, il rejoint le 1er RA, et le lieutenant-colonel Laurent-Champrosay le prend à ses côtés en qualité de capitaine adjoint. Il participe à la campagne de Tunisie, durant laquelle il met au point une méthode rapide pour lancer les concentrations de tir. Au mois d’octobre 1943, lors de la réorganisation du régiment, il se voit confier la 6e batterie. Il la mènera avec ardeur et brio en Italie, toujours en position d’observatoire avancé, pour appuyer la marche de l’infanterie ou écraser des feux de sa batterie, ou du régiment, les contre-attaques ennemies.
Au moment de l’embarquement à Tarente, il quitte le 1er RA pour prendre un bureau de l’état-major de la division.
Au mois d’octobre 1944, il est appelé au ministère de l’Intérieur comme conseiller du nouveau directeur général de la Sûreté nationale pour la remise sur pied des services de police et de sécurité. La Surveillance du territoire, chargée du contre-espionnage, dissoute en 1942, est rétablie et constitue une des trois grandes directions de la Sûreté nationale. Elle lui sera confiée et, avec son expérience de la guerre, son souci de la rigueur et de la méthode, il en fera un outil performant pour la défense de la France. La compétence de cette direction sera étendue à l’Algérie et aux départements d’outre-mer.
Après quinze années de direction de ce grand service, il sera appelé à la tête de l’Inspection générale des services de la police nationale.
Homme de culture, auteur de pièces de théâtre, il s’adonnait à la peinture et à la sculpture avec un talent certain.
Roger Wybot, lieutenant-colonel de réserve, était Compagnon de la Libération, commandeur de la Légion d’honneur, titulaire de la croix de guerre avec palmes et de plusieurs distinctions alliées.
Lors de ses obsèques, célébrés le 1er octobre dernier en l’église Saint-Louis des Invalides, le général Simon, chancelier de l’ordre de la Libération, devait dire devant sa dépouille, dans la grande cour où les troupes rendaient les honneurs : « Vous avez bien servi la France. »
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 302, 2e trimestre 1998.