Le 1er B.F.M. Commando à Flessingue (1er novembre 1944-31 mai 1952)
En octobre 1944, la capture d’un grand port sur le continent était devenue une nécessité impérieuse pour les armées alliées. Tous ceux de la côte franco-belge étaient, soit hors d’usage, soit encore aux mains de l’ennemi ; seul le port d’Anvers, le premier du continent, avait été libéré, intact par les Anglais, le 4 septembre; mais Anvers se trouve à près de 80 kilomètres à l’intérieur des terres, et les deux rives de l’Escaut étaient encore occupées par les Allemands. À la fin d’octobre, après un mois de combats acharnés, seule l’île de Walcheren restait encore à conquérir, faute de quoi Anvers serait inutilisable.
Cette île a la forme d’une soucoupe : le centre en est au-dessous du niveau de la mer, et ses les dunes qui la bordent empêchent la mer du Nord de la recouvrir. Les Allemands, s’y étaient formidablement retranchés. Outre plusieurs batteries de canons lourds, la côte est hérissée d’obstacles, de blockhaus et d’abris ; le centre de l’île, absolument plat, est couvert de champs de mines, de barbelés, de casemates. Une attaque, dans ces conditions, eût été terriblement coûteuse. L’état-major allié eut alors l’idée originale, pour bouleverser le plan de défense allemand, d’inonder l’île ; le 3 octobre et les nuits suivantes, les bombardiers lourds pulvérisèrent les dunes en quatre points, et la mer du Nord s’engouffra par les brèches. Seules restaient émergées les dunes côtières et les villes de Flessingue et de Middelburg. Ayant ainsi limité l’objectif, on décida d’attaquer l’île de trois côtés à la fois : par l’est, le long de la chaussée la reliant à la terre ferme, attaque qui fut confiée aux Canadiens, par l’ouest, en débarquant trois commandos de fusiliers marins anglais à Westkapelle, et par le sud en débarquant, en pleine ville de Flessingue, le n° 4 commando franco-britannique, unité composée de six compagnies (ou troupe), dont deux françaises libres (formant le 1er B.F.M. Commando). Soit en tout 550 hommes.
Les derniers jours du mois d’octobre furent consacrés à un entraînement intensif en vue de l’opération : combats de rues, exercices dans les dunes, étude des cartes et des photographies d’avion ; chaque homme connaissant parfaitement la mission de son unité et l’importance de la mission qui nous était confiée. Le 31, le commando se transporta à Breskens, petit port situé sur la rive sud de l’Escaut, face à Flessingue. La ville était dévastée par les combats récents et, sous le ciel gris, offrait un spectacle de désolation navrante. À travers le fleuve, large de 3 kilomètres, on devinait dans la brume les grues et les installations du port de Flessingue, notre objectif, si proche et si lointain. Nous espérions bénéficier de l’avantage de la surprise ; mais, par suite d’une fausse manœuvre, une compagnie de chars amphibies qui descendait l’Escaut en tendant un rideau de fumée, s’arrêta à l’entrée du port de Breskens bondé de chaloupes de débarquement ; ces preuves d’activité n’échappèrent pas aux Allemands, et dans la soirée le port fut bombardé, heureusement sans grand dommage, alors que l’unité venait de terminer un exercice d’embarquement.
Les défenses allemandes de Flessingue étaient en vérité formidables : 10.000 soldats allemands se tenaient dans l’île de Walcheren, dont un tiers à peu près dans Flessingue même. Le rivage était partout hérissé d’obstacles sous-marins, certains munis de mines et d’obus ; des réseaux de barbelés, battus par des armes de tous calibres, en couvraient tous les abords ; les canons de D.C.A., très nombreux, étaient disposés de manière à pouvoir également servir contre les troupes à terre ; des batteries de canons, disposées autour de la ville, renforçaient encore le dispositif.
Le problème le plus difficile était de trouver un point de débarquement convenable, au milieu de cette côte hérissée d’obstacles ; le choix se porta finalement sur une sorte de plage, “Uncle Beach” (tous les objectifs avaient reçu des noms en code), relativement isolée des défenses principales de la ville ; bien que protégée par des ouvrages importants, on espérait pouvoir y établir une tête de pont avant que les Allemands soient revenus de leur surprise ; un vieux moulin à vent, situé sur la digue, en rendait l’identification facile.
Le plan d’attaque était simple. Le commando était divisé en trois groupes. Une première vague, composée d’éléments de reconnaissance, devait choisir le point précis de débarquement, neutraliser les résistances locales et frayer un chemin aux vagues suivantes à travers les obstacles. Une seconde vague, comprenant deux troupes et des éléments de déminage, devait débarquer immédiatement après et établir une tête de pont solide, qu’elle étendrait ensuite en direction de “Brighton” et de “Falmouth”.
La troisième vague, formée du reste du commando, débarquait 15 minutes plus tard, sur signal de la tête de pont. La troupe 3 devait enlever l’entrée du petit port de “Brighton”, la place “B”, les maisons de “Hove”, la troupe 5 (française), marchant dans son sillage, devait attaquer la région de “Worthing” et s’installer à “Dover”, tandis que la troupe 6 (française) avec la section de mitrailleuses lourdes devait foncer sur “Bexhill”, capturant la poste au passage, et s’y installer. Le facteur vitesse était capital, car la possession de “Dover” et de “Bexhill” commandait les approches de la ville les carrefours entre nos mains, il devenait impossible aux Allemands d’y faire passer des renforts.
La libération du nord de la ville et l’exploitation, vers Middelburg était confiée à une brigade de la 42e division écossaise, infortunée division, entraînée pour le combat de montagne, et contrainte d’opérer au-dessous du niveau de la mer.
Les troupes d’assaut bénéficiaient d’un appui de feux considérable ; on avait prévu un bombardement par bombardiers lourds jusqu’à H-15, mais les conditions atmosphériques étaient défavorables, il fallut le remplacer par un tir d’artillerie ; cinq régiments d’artillerie de campagne, trois régiments d’artillerie moyenne et quelques batteries lourdes, plus de quatre régiments d’artillerie moyenne pour contre-batterie.
Le 1er novembre, à 3 h 15 du matin, le commando embarquait à Bresken, sur les L.C.A. ou barques d’assaut ; à 4 h 40, l’embarquement était terminé, et la flottille se dirigeait en silence vers l’entrée du port et l’estuaire de l’Escaut, en attendant l’heure H. Il faisait sombre et froid et la mer, agitée de courtes lames, giflait d’embruns les soldats accroupis. On avait signalé des mines flottantes et des sous-marins de poche, contre lesquels on montait une garde vigilante. À 4 h 45 (H-60), le bombardement se déclencha, terrible, et bientôt des incendies éclataient dans la ville ; sur ce fond de flammes, le moulin choisi comme repère se détachait avec une netteté parfaite.
À 5 h 45, la première vague touche terre, au moment précis où le tir d’artillerie s’allongeait ; les derniers obus éclataient encore sur la digue quand les premiers commandos sautèrent sur le rivage. Ils escaladèrent les palissades, se frayèrent un passage dans les barbelés, et tombèrent sur les Allemands, encore terrés dans leurs casemates, sans qu’un coup de feu ait été tiré. Tout de suite, on disposa des bandes de toile blanche sur le sol pour marquer le passage et on appela la deuxième vague.
À ce moment, les Allemands, revenus de leur surprise, commencèrent à tirer à balles traçantes sur les embarcations qui approchaient : feu maigre d’abord et mal ajusté, mais qui devint bientôt très intense et nourri. Le débarquement se fit cependant sans perte, et les troupes se lancèrent à leur objectif, capturant un canon de 75 et un canon de 50 qui furent immédiatement tournés contre l’ennemi.
La troisième vague débarqua à 6 h 30, alors que l’aube pointait à peine, sous un feu nourri ; une embarcation heurta un obstacle sous-marin et coula avec les mortiers et les mitrailleuses lourdes ; le matériel fut sauvé à temps et était en action une heure plus tard.
La troupe 6 (française) guidée par un officier de police de Flessingue, membre de la résistance, se lança immédiatement sur son objectif, Bexhill. Une courte halte à la poste permit de s’assurer de l’immeuble à coups de grenades et de faire une cinquantaine de prisonniers ; puis, à toute vitesse, négligeant ou contournant les résistances allemandes isolées, elle avança sur ses positions. Elle y arriva à 8 heures, s’y heurtant à une compagnie allemande qui descendait en renfort vers le centre de la ville.
La stupeur des Allemands de nous trouver au cœur de leur dispositif était complète. Quelques rafales de mitraillette et de bren-gun les obligèrent à se réfugier dans les maisons voisines ; nous en fîmes autant et l’action s’engagea ; quelques hommes de chez nous tombèrent ; un sous-officier se trouva isolé dans une maison, à un endroit particulièrement important, et Il y tint une heure entière, interdisant aux Allemands l’accès de la rue, avant d’être rejoint par le reste de sa section ; d’autres furent également isolés et cachés par des civils hollandais en attendant de rejoindre l’unité à la faveur de la nuit. Mais l’objectif principal était atteint : “Bexhill” était solidement entre nos mains et toute la durée de l’opération.
Pendant ce temps, la troupe 3 se dirigeait vers les positions allemandes de “Hove”, assez gênée dans sa progression par des éléments ennemis situés à “Brighton”. La résistance se montra si forte qu’il fallut attendre les renforts d’infanterie pour les attaques. La troupe 5 (française) qui marchait sur ses pas éprouva les mêmes difficultés en approchant de “Worthing”, son premier objectif, elle décida donc d’en laisser l’attaque à l’infanterie et de concentrer ses efforts sur le carrefour de “Dover”, son second et plus important objectif. Les positions allemandes y étaient très fortes : Flackvierling (canon de D.C.A. de 20 mm à quatre tubes), mitrailleuses sous casemates battaient toutes les approches. La troupe s’établit dans les maisons de la rue “E” et, par son tir précis, empêcha tout mouvement de l’ennemi ; les tireurs de précision, avec leur fusil à lunette, s’en donnèrent à cœur joie, tandis que le PIAT (sorte de Bazooka) tirait sur les créneaux.
Dans la soirée, toute la ville au sud de la rue « E » était conquise, à l’exception des régions “Hove” et de “Worthing” ; les troupes du commando ainsi rendues disponibles furent envoyées à l’aide des troupes 3 et 5. Pendant toute la journée les renforts écossais avaient débarqué à “Uncle Beach”, atteignant la force de deux bataillons. Les chars amphibies amenaient sans arrêt munitions et ravitaillement, déchargés par des hommes du train sous un feu incessant ; ils furent bientôt aidés par un nombre croissant de prisonniers.
La nuit apporta un répit aux combats ; cependant, dans la région de Bexhill, les Allemands essayèrent une contre-attaque, appuyée par un lance-flammes. Elle fut brisée net par les guetteurs français qui, d’une rafale de bren-gun, étendirent les servants sur le terrain ; cette démonstration de vigilance, appuyée par un barrage nourri dans les minutes suivantes, montra aux Allemands qu’ils ne devaient pas espérer nous déloger.
Au petit jour, un bataillon écossais lança une attaque pour dégager la partie de la ville au nord de Bexhill ; elle fut précédée d’un bombardement d’artillerie réellement formidable ; la troupe 6 fut engagée, mais, malheureusement, les obus tombèrent court, tuant une dizaine d’Anglais dans une maison voisine avant qu’on ait pu rectifier l’erreur. La fumée des explosions trainait encore dans la rue que les Écossais se lançaient à l’assaut, appuyés par le feu de la troupe 6, et bientôt les prisonniers affluaient dans nos lignes, terrifiés et hagards.
Le nettoyage de “Worthing” et de “Dover” se fit systématiquement. La troupe 5 traversa la rue, longeant le bassin sous couvert d’un rideau de fumée, et progressa de maison en maison vers son objectif. Chaque homme était muni de charges explosives, avec lesquelles on perça des trous dans les murs de séparation : progression lente et difficile, mais la seule praticable. En fin d’après-midi les dispositions d’assaut étaient prises, des avions “typhons” piquèrent sur “Dover” lâchant leurs fusées avec une précision incroyable, à moins de 100 mètres de nos troupes ; sous couvert d’un feu d’enfer, un volontaire allait se précipiter sur la casemate principale pour en faire sauter la porte blindée, quand un pavillon blanc fit son apparition : trois officiers et 54 Allemands sortirent de leurs abris, les bras en l’air ; leurs tribulations n’étaient pas finies, car les Allemands des positions voisines, les voyant se rendre, tourneront immédiatement leurs armes contre eux et les arroseront de balles, ce qui les précipita encore plus vite dans nos bras. Ces farouches Nazis, retranchés autour de leur P.C. de l’hôtel Britannia, ne devaient d’ailleurs pas tarder à rejoindre leurs camarades derrière les barbelés. Une attaque des Écossais, dans la nuit du 2 au 3, à travers la plaine inondée, eut raison de leur résistance, et ce fut la fin de l’occupation allemande pour Flessingue et le sud de Walcheren.
Pendant que le n° 4 commando libérait Flessingue, le reste de la brigade débarquait en plein jour à Westkapelle, plus au nord. Elle s’y heurta à une résistance acharnée, et les pertes furent lourdes. Les troupes prirent cependant pied sur le rivage et se déployèrent de part et d’autre de la brèche creusée dans la digue, le long des dunes, attaquant chaque batterie allemande et la neutralisant.
Le 4 novembre, le n° 4 commando passait en réserve de brigade et des chars amphibies, le transportaient, à travers l’île inondée, vers Westkapelle où les derniers Allemands résistaient encore. Spectacle étrange et navrant que celui de ces maisons submergées, de ces fermes ruinées, de ces arbres morts, brûlés par le sel ; de quel prix ces pauvres Hollandais ont-ils payé leur libération ! Leur sacrifice n’a pas été vain et il est pas douteux que l’inondation a puissamment contribué au succès de l’opération, ne serait-ce qu’en minant le moral des Allemands. Les témoignages des prisonniers furent tous formels sur ce point. Les quelques civils qui rentraient dans les rares maisons épargnées par l’eau, nous recevaient de leur mieux ; c’étaient des paysans, portant le curieux costume local, avec de jolies coiffes de dentelle pour les femmes ; leur joie d’être enfin libres faisait plaisir à voir.
Pour frapper le coup décisif le général Leicester, commandant la brigade, décide de lancer le n° 4 commando dans une attaque de nuit, sur l’arrière des positions allemandes, dans la région de Wrouwenpolder. La surprise de l’ennemi fut, une fois de plus, totale ; aux premières heures du jour le colonel allemand envoyait un parlementaire pour négocier la reddition de sa troupe, et bientôt des centaines de prisonniers se dirigeaient vers l’enceinte hâtivement préparée pour les recevoir en attendant leur transfert ; les hommes formaient un mélange étrange de toutes races, mais les officiers n’avaient rien perdu de leur arrogance et de leur foi en la victoire allemande. Au total, près de 10.000 Allemands, dont un général de division furent faits prisonniers dans l’île. C’est au fanatisme des officiers et des sous-officiers qu’il faut attribuer l’acharnement de la résistance dans cette région et les lourdes pertes alliées : 27.633 soldats alliés tombèrent au cours des combats pour Anvers contre 25.000 en Sicile où la garnison était de 350.000 hommes.
Par contre, les pertes du commando furent relativement légères, malgré les risques que comportait sa mission. L’audace des plans, l’élan avec lequel ils furent exécutés, la parfaite coopération entre les armes, et l’aide reçue des Hollandais, aboutirent à un succès spectaculaire, qui fit de cette opération l’un des modèles du genre. Ainsi n° 4 commando, première unité à débarquer sur l’île de Walcheren, en avait achevé la conquête et la libération ; pour la première fois depuis le raid de Dieppe, en 1942 (auquel le n° 4 commando avait également pris part), un fort fortement occupé par l’ennemi avait été attaqué de front, et cette fois avec un succès complet. Anglais et Français du n° 4 commando avaient justifié la devise des opérations combinées : « United we conquer ».
*
Le 31 mai 1952, le n° 4 commando, reconstitué pour la circonstance, effectuera un nouveau débarquement à Flessingue, pacifique cette fois. La municipalité avait invité les survivants de l’unité à venir assister à la cérémonie d’inauguration d’un monument aux morts, à la mémoire des habitants de Flessingue et des soldats anglais et français du n° 4 commando tombés au champ d’honneur, pendant cette guerre.
Le groupe français, sous la direction de son ancien chef, le capitaine de corvette P. Kieffer, quitta Paris le 30 mai, dans un autocar mis à sa disposition par le ministère des Anciens Combattants. Arrivé à Dunkerque le 31 mai au matin, il embarqua sur la frégate la Surprise, ex-F.N.F.L., que M. l’amiral Robert avait envoyée de Brest pour la circonstance. À midi, la frégate faisait son entrée dans le port de Flessingue, où elle retrouvait un destroyer anglais, H.M.S. Opportune, qui avait, de son côté, effectué le voyage avec le contingent anglais.
À 14 heures, une cérémonie religieuse, dans la vieille église de Flessingue, réunit Hollandais et anciens commandos ; le Rév. Armstrong et M. l’abbé de Naurois, notre ancien aumônier, y évoquèrent la mémoire de nos camarades et la grandeur de leur sacrifice. Puis un défilé conduisit les commandos à “Uncle Beach”, devant le monument. Sous la présidence de S.E.M. Ir C. Staf, ministre hollandais de la Guerre, et en la présence des ambassadeurs de Grande-Bretagne et de France, de M. le général Laycock, ancien chef des opérations combinées, de M. le général Leicester, qui commandait à Walcheren la 1re brigade de commandos, la statue fut dévoilée, tandis que retentissaient les hymnes nationaux hollandais, anglais et français. Au bord de la mer, sur cette terre de Flessingue que leur unité a libérée, les morts du n° 4 commando, ont désormais leur monument : une simple statue d’un des leurs se jetant à l’assaut, comme eux-mêmes l’ont fait :
“Here, dead we lie because we did not choose.
To live and shame the land from which we sprung
Life to be sure is nothing much to lose
But young men think it is and we were young.” (1)
To live and shame the land from which we sprung
Life to be sure is nothing much to lose
But young men think it is and we were young.” (1)
Pendant ces deux jours passés à Flessingue, nous avons retrouvé le même accueil enthousiaste et chaleureux, la même gentillesse que six ans plus tôt. La municipalité et tout spécialement le bourgmestre, M. Kolff, qui fit tant pour faire de cette cérémonie ce qu’elle a été, avait organisé notre séjour de la manière la plus charmante possible. Nous étions reçus chez les habitants de la ville et leur hospitalité nous est allée droit au cœur.
Le 31 mai, au soir, un banquet et une fête réunirent Hollandais, commandos et marins de l’Opportune et de la Surprise. Le lendemain nous sommes allés faire le tour de la ville et de l’île de Walcheren. Tous, nous en sommes revenus émerveillés par le travail de reconstruction accompli par les Hollandais. Là où nous n’avions connu que maisons en ruines et campagnes inondées, nous avons trouvé des villages souriants, d’une exquise propreté, des champs couverts de moisson, des arbres en fleur ; cela tient du miracle.
C’est à regret que nous avons quitté Flessingue et ses aimables habitants : tous, nous aurions voulu prolonger de quelques jours un séjour si riche en souvenirs. Nous savons que nous pourrons laisser à Flessingue le monument à la mémoire de nos camarades, il y sera bien gardé.
Guy Vour’ch
(1) “Nous sommes tombés, parce que nous n’avons pas voulu vivre et déshonorer la terre d’où nous sommes sortis. La vie, certes, n’est pas chose si importante à perdre; mais les jeunes gens pensent le contraire, et nous étions jeunes.”
Extrait de la Revue de la France Libre, n° 52, novembre 1952.