Jean Morlaix (Jean Demozay)

Jean Morlaix (Jean Demozay)

Jean Morlaix (Jean Demozay)

Le 19 décembre 1945, un avion militaire qui revenait de Londres par des conditions atmosphériques particulièrement mauvaises s’écrasait près de Jouy-en-Josas. Parmi les victimes que les témoins relevèrent se trouvait le colonel Morlaix, des Forces aériennes françaises libres.

Plus de six mois après la cessation des hostilités contre l’Allemagne, l’armée de l’air continue à payer largement son tribut et un à un nous voyons partir nos camarades du début.

Jean Morlaix était né en Bretagne. En septembre 1939, en raison de sa connaissance de la langue anglaise, il était détaché auprès de la Royal Air Force basée en France. En juin 1940, il part immédiatement pour l’Angleterre où il se met à la disposition du général de Gaulle. Après un stage de trois mois dans les écoles de la R.A.F., il est affecté à un groupe anglais, avec lequel il participe à la lutte contre la Luftwaffe. Il est parmi les premiers à avoir remporté en Grande-Bretagne une victoire aérienne. Dans la nuit du 11 mai 1941, au cours de la plus violente attaque que Londres ait connue, Jean Morlaix abat un Junker 88, portant à trois le nombre des victoires remportées par les aviateurs français cette nuit-là. Les mois qui suivirent furent pour lui une suite étincelante de succès.

Rapidement il prend la tête du palmarès des F.A.F.L. et bientôt se place parmi les meilleurs chasseurs de l’aviation alliée, sur la liste desquels il est classé en dixième position.

Au début de 1942, il est appelé à l’état-major de la IIe région aérienne de chasse du territoire britannique, le fameux « IIe group », où ses connaissances techniques sont hautement appréciées. Au mois de juin de la même année, nos Alliés lui confient le commandement d’un Squadron spécialisé dans les reconnaissances à longue distance sur les côtes continentales. Il reste à ce commandement jusqu’en février 1943, il est alors envoyé à Alger par le général de Gaulle qui le prendra plus tard dans son état-major particulier.

Promu lieutenant-colonel en juin 1943, il est envoyé au Moyen-Orient comme commandant en chef de l’aviation française. Rappelé à Alger en avril 1944, M. Grenier, ministre de l’Air, le prend à son cabinet militaire.

En juillet 1944, le lieutenant-colonel Morlaix constitue le groupement « Patrie », comprenant les escadrilles « Béarn » et « Picardie » destiné à sou- tenir les F.F.I. du Sud-Ouest. En août, le groupement part d’Afrique du Nord sur des avions Glenn Martin et atterrit près de Toulouse, prenant immédiatement une part active au combat. L’épopée de ce groupe est une des plus étonnantes de cette guerre.

Alors que les armées de l’air alliées et ennemies opéraient grâce à une organisation de ravitaillement et de renseignement extrêmement complexe, les escadrilles du colonel Morlaix se battirent en prélevant leur essence sur les prises à l’ennemi. Leurs munitions étant amenées d’Afrique du Nord par avion. Aucun échelon roulant ni maté- riel de parc n’était à leur disposition, et cependant chaque jour l’ennemi voyait détruire ses convois du Verdon à Ruffec, en passant par Poitiers.

La fin des hostilités ne laissa pas le colonel Morlaix inactif. Après avoir été affecté au cabinet militaire du ministre de l’Air, il est appelé à la direction des écoles. C’est à cette tâche magnifique, sur laquelle repose l’avenir de nos ailes françaises, qu’il voulait consacrer son activité et son expérience. C’est à cette tâche qu’il a trouvé la mort dans ce combat sans fin contre les éléments qui est l’honneur des hommes de l’air.

Le colonel Morlaix était décoré de la croix de commandeur de la Légion d’honneur, de la croix de la libération, de la croix de guerre avec 16 palmes, de la croix de guerre belge avec palmes, de la croix de guerre tchécoslovaque, de la Dintinguished Service Order, de la Distinguished Flying Cross avec bar, et de la D.F.C. américaine. Il comptait à son palmarès 22 victoires officielles et neuf probables. Il était le deuxième sur la liste des as de l’aviation française.

Extrait du Bulletin de l’Association des Français Libres, n° 2, janvier 1946.