Les stratégies et tactiques militaires allemandes et alliées au début de 1944
Le contexte
Depuis l’échec des offensives allemandes de 1942 contre les Britanniques à El Alamein (23 octobre-3 novembre 1942 et contre les Soviétiques à Stalingrad (17 juillet 1942-2 février 1943), la Wehrmacht est en recul face aux forces alliées. L’échec de son attaque contre le saillant de Koursk (5 juillet-23 août 1943) fait comprendre à Hitler que la Wehrmacht ne pourra plus obtenir la décision globale sur le front de l’Est. En conséquence, il transfère son effort stratégique à l’Ouest. Si les Alliés anglo-américains subissaient un grave échec, lors d’une tentative de débarquement, il espère les amener à la conclusion d’une paix favorable. Pour ce faire, il compte s’appuyer sur un important système de fortifications côtières bâties entre 1942 et 1944, de la frontière hispano-française au nord de la Norvège, par l’organisation Todt.
Après le débarquement anglo-américain au Maroc et en Algérie (8 novembre 1942) et la reddition des dernières forces allemandes retranchées en Tunisie, le 13 mai 1943, les Alliés débarquent en Sicile le 10 juillet 1943, provoquant la chute de Mussolini quinze jours plus tard et la signature d’un armistice avec l’Italie, rendu officiel le 8 septembre. Dans les jours précédant cette annonce, les Alliés débarquent en Calabre et à Salerne.
En réaction, les Allemands lancent l’opération Alaric, au cours de laquelle elles désarment les troupes italiennes et prennent le contrôle de l’ensemble du territoire non occupé par les Alliés. Une ligne de défense, la ligne Gustav, est organisée au nord de Naples pour bloquer l’avancée alliée.
L’enjeu pour les Alliés est de briser la “Forteresse Europe” (“Festlung Europa” en allemand, “Fortress Europ” en anglais) en multipliant les bombardements et les zones de combats.
Le document
En route… est une revue française bimensuelle publiée à Beyrouth par le service de propagande des Forces françaises libres en Moyen-Orient à partir de décembre 1941 et jusqu’en 1944. Elle est vendue en Syrie-Liban, Palestine et Égypte. Le numéro 36 du 15 juin 1943 est tiré à 10 066 exemplaires, dont 7 142 sont livrés aux Messageries.
Le numéro n° 52 paraît le 1er mars 1944. À cette date, l’offensive soviétique lancée à la mi-janvier pour dégager Leningrad a permis à l’armée Rouge de progresser jusqu’à la frontière estonienne. En Italie, le 15e groupe d’armées du général Harold Alexander est engagé contre la 10e armée allemande, retranchée derrière la ligne Gustav, dans la bataille de Monte Cassino.
“La défense nazie sur les grands fronts”
Publié en page 6 sous la signature anonyme de “L. F.”, l’article “La défense nazie sur les grands fronts” analyse, non sans humour, une récente intervention radiophonique du général Kurt Dittmar (1891-1959), commentateur radiophonique officiel des forces armées allemandes depuis avril 1942, sur « les succès défensifs » de la Wehrmacht « et la morale qui en découle ». Sous couvert de tirer des conclusions sur l’option défensive adoptée par la Wehrmacht, marquée par une “défensive élastique”, la constitution de lignes de fronts successives et la multiplication d’éléments retardateurs, l’auteur ironise sur la maîtrise des Allemands en matière tactique, vantée par Dittmar. En effet, celle-ci a “conduit la Wehrmacht du Mont Elbrouz”, au nord du Caucase, approché lors de l’opération “Fall Blau”, à l’été 1942, « aux fondrières du Pripet », un affluent du Dniepr, coulant en Biélorussie et en Ukraine. À ce rythme, “il est certain que la Wehrmacht, en dépit des efforts de l’ennemi, sera la première à entrer à Berlin”.
Coll. Fondation de la France Libre
“Esprit d’offensive”
“Esprit d’offensive”, paru page 8, est la traduction française d’un article d’Evgueni Guenrikhovitch Kriguer (1906-1983), un écrivain et journaliste soviétique, correspondant de guerre des Izvestia, l’un des principaux journaux russes, de 1941 à 1945. Dans cet article, Kriguer décrit, sur un ton dithyrambique, une division d’infanterie russe animée, du simple soldat au général, d’une audace et d’un courage qui la placent “à l’extrême pointe du saillant enfoncé dans la profondeur du front allemand”.
Coll. Fondation de la France Libre
< La forteresse nazie à la veille des grandes offensives de l’été 1944